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HOMANDRAIKISANTAONA

Qui se prononce en Français à peut prés comme ça : “hou mane dray ki santone” et qu’on pourrait traduire par : Celui qui ne mange qu’une fois par an.
C’est une des histoires traditionnelles malgache que nous avons utilisée pour créer le spectacle Angano-Angano Arira-Arira. Elle parle d’un monstre terrifiant d’un roi, d’une princesse…

Jadis existait un animal monstrueux, qui avait sept langues, et qui réclamait, chaque année, un sujet du Roi Tsiromandidy[1],
Homandraikisantaona habitait dans le lac Doany[2]. Chaque année, le même mois, la même nuit, le Roi voyait en songe la personne à sacrifier. Qu’elle fût un mauvais ou un bon sujet, la personne nommée était attachée à un poteau sept jours après dès le grand matin.
L’eau du lac s’agitait, une flamme en sortait,. Jamais on ne vit de tête, seulement une longue langue bleue qui rampait, qui saisissait la victime et l’entraînait sous l’eau. Les personnes désignées pour assister aux sacrifices devaient rester dans une forêt voisine, à cent mètres environ du poteau. Interdiction absolue de pleurer, interdiction absolue de se montrer affligé. Tout devait se passer dans la sérénité : le Dieu le voulait ainsi.
Cette année-là, le Roi rêva et vit en songe que c’était son unique fille qui devait être sacrifiée. Arrêt fatal contre lequel aucun recours n’était possible ! Le Roi appela sa fille et lui dit : «C’est toi que Homandraikisantaona veut manger ». Et la fille de répondre : « Si c’est mon tour, j’irai, car tous ceux qui ont péri jusqu’ici auraient aussi aimé vivre plus longtemps. J’irai, papa, j’irai, et ne t’inquiète pas. »
Sept jours ont passé. La jeune fille est dirigée vers le rivage et liée au poteau. L’heure avance, l’eau du lac Doany [2]se trouble, une flamme en sort, une langue bleue surgit et rampe…
Alors ! Un jeune homme monté sur un cheval noir, armé d’une lance et d’un bouclier, accourt et tranche cette première langue. Une deuxième langue sort et vient ; elle est coupée sans pitié. La troisième, la quatrième, la cinquième et la sixième langue sont coupées tour à tour et jetées comme les deux premières dans un sac. Alors on vit apparaître, un dos voûté semblable à une roche, et l’on entendit un rugissement sourd et terrible. La septième langue sortit de l’eau, rampa et s’approcha de poteau. Elle fut coupée sans tarder et rejoignit dans la soubique[3] les six premières. L’animal fit alors un saut terrible. Toute l’eau du lac Doany[2] jaillit si haut que ses gouttes formèrent les étoiles et les nuages.


Homandraikisantaona mort, la fille du roi sauvée, le garçon s’éclipsa, emportant la soubique[3] contenant les sept langues, et une bague que la jeune fille lui donna en signe de gratitude.
A la nouvelle que la fille du roi était sauvée, que l’animal dévoreur était mort, qu’il n’y aurait plus de sacrifices, oh ! qui n’auraient pas chanté, dansé, applaudi, sifflé, fredonné sa chanson favorite ; qui n’aurait pas lancé son chapeau en l’air ; qui n’aurait pas battu son tambour, touché sa valiha[4], fait vibrer la corde de son violon ; qui n’aurait pas abattu son bœuf. Le roi dansa, la reine dansa. On dit même que ce jour là les caïmans ont aussi dansé, que les anguilles, sous l’eau, ont fait claquer leur queue contre les roches pour manifester leur joie. Seuls, semble-t-il, les sangliers n’ont pas participé à la fête. La race porcine est la plus bizarre de toutes les créations de Dieu : dans le bonheur général, sa philosophie veut trouver des raisons de tristesse.
Le roi a donc beaucoup dansé. Il a fredonné sa chanson favorite. Puis il réunit son conseil, convoqua le peuple au palais et tint ce discours : « Peuple, je suis heureux. J’ai dix mille bœufs dans mon royaume ; je vous autorise à en tuer autant que vous voudrez. Pendant un mois, je veux que vous mangiez de la viande. J’ai du sel à la maison, venez en prendre. J’ai de l’argent dans ma caisse, que ceux qui n’ont pas de quoi s’acheter de l’huile viennent m’en demander. Si des jeunes gens n’ont pas de bœufs pour chercher des femmes, qu’ils viennent chez moi ; que ceux qui veulent retourner les restes mortels de leurs ancêtres me confient leurs peines ; j’ai des bœufs et de l’argent pour payer les lambamena[5]. Soyez heureux, ô peuples, soyez heureux ».
La fille demanda : « Père, pourrais-je connaître mon sauveur et le libérateur du royaume ? ». Le crieur public fut appelé, et il fut bientôt répandu dans tout le royaume que celui qui avait sauvé la fille du roi devait se présenter au palais pour recevoir sa récompense.
Deux garçons se présentèrent. Ils dirent : « Grand roi, que tu sois le seul saint du royaume. Nous avons sauvé ta fille pour te rendre heureux. Nous avons fui, car nous tenions à rendre nos actions anonymes. Maintenant que tu tiens à nous connaître, nous nous déclarons, car autrement nous te rendrions malheureux. Nous avons coupé les sept langues de Homandraikisantano, nous avons coupé la corde qui liait ta fille au poteau ». Le roi appela sa fille et lui dit : « Voilà les sauveurs du royaume et de la race ». La fille n’a point ri, elle n’a même pas salué son père ; elle a baissé les yeux, puis faisant volte face, elle a rejoint sa chambre et s’est endormie.

A ce moment, un garçon apparut, apportant une soubique[3], une lance et un bouclier. Il dit : «Grand roi, je viens t’apporter les sept langues de Homandraikisantaona et la bague de ta fille ».Cette vois si faible et si timide parvint à la princesse. Elle sortit de sa chambre, avança vers le jeune homme, lui baisa la main et s’agenouilla, tremblante, devant lui. « Lève-toi, ma reine, lui dit le garçon, je ne suis que ton esclave ; j’ai servi mon roi en tuant Homandraikisantaona ; en te sauvant, je n’ai fait que mon devoir ».
Chacun des trois garçons reçut quelque chose : les deux premiers eurent leurs coups de fouets, la princesse épousa le troisième.

[1]qu’on peut traduire par : Celui qui dirige tout est le nom d’un souverain Malgache
[2]est un Lieux Sacré
[3] Soubique du mot malgache qui désigne un panier fait de vannerie
[4] Le valiha est une variété de cithare tubulaire en bambou qu’on rencontre dans tout Madagascar.
[5] est l’habit mortuaire traditionnel Malgache

 

Alex

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